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Sent: Wednesday, June 22, 2016 11:17 AM
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Subject: Consultation droit voisin / réponse des éditeurs de presse français
Importance: High
Mesdames, Messieurs,
Nous vous prions de bien vouloir trouver
ci-joint la contribution des éditeurs français de la
presse quotidienne nationale à la consultation européenne sur « Le rôle des éditeurs dans
la chaîne de valeur des droits d’auteur » :
2 documents sont joints :
Une contribution avec des propositions de modification de la directive « droit
d’auteur » de 2001
Les réponses au questionnaire de la consultation.
Nous souhaitons que cette contribution soit confidentielle, et ne soit donc pas rendue
publique.
Restant à votre disposition pour tout renseignement complémentaire.
Bien à vous,
Syndicat de la Presse Quotidienne Nationale
15 rue La Fayette - 75009 Paris / France
CONFIDENTIEL
Paris, le 20 juin 2016
RÉFORME EUROPÉENNE DU DROIT D’AUTEUR : LES ENJEUX D’UN « DROIT VOISIN »
POUR LES ÉDITEURS DE PRESSE
La Commission européenne a lancé le 23 mars dernier une consultation publique sur le rôle des
éditeurs dans la chaîne de valeur du droit d’auteur. Son objectif est de
« savoir si les éditeurs de
journaux, de magazines, de livres rencontrent des problèmes dans l’environnement numérique en
raison du cadre juridique actuel dans le domaine du droit d’auteur, notamment pour ce qui concerne
leur capacité à délivrer des licences et à être rémunérés pour l’utilisation en ligne de leurs contenus ».
C’est dans ce contexte que les organisations professionnelles de presse quotidienne et magazine des
différents pays européens se mobilisent actuellement auprès des institutions européennes afin que
soit envisagée la
création d’un « droit voisin » au bénéfice des éditeurs de presse.
Les éditeurs de la presse quotidienne nationale française sont convaincus de l’intérêt de
l’instauration d’un tel droit pour contribuer à assurer la pérennité d’entreprises de presse
innovantes, et ainsi conforter le pluralisme et la diversité des publications de presse.
L’instauration d’un « droit voisin » viserait en effet à :
Assurer une meilleure protection des contenus de presse, à l’image des protections
intellectuelles historiquement mises en place pour d’autres industries culturelles (cinéma,
musique et audiovisuel) ;
Permettre aux éditeurs et aux agences de presse de corriger les conséquences manifestes,
et néfastes, de l’insuffisance de la protection par la propriété intellectuelle à laquelle ils
sont soumis (copie privée, crawlers, etc.)
tout en :
-
respectant les principes de liberté de la communication et d’information, et leur
corollaire l’accès à un Internet libre et ouvert pour les internautes. La reconnaissance
d’un droit voisin au profit des éditeurs de presse ne saurait en aucun cas limiter la
liberté d’accès et de diffusion des contenus de la presse. À ce titre, il ne doit prévoir
une protection au profit des éditeurs que lorsque les contenus sont utilisés par des
tiers à des fins directement commerciales.
-
et en confortant la logique de partenariat entre éditeurs et diffuseurs de contenus,
qu’il s’agisse de diffuseurs ou de distributeurs de presse papier ou de presse en ligne.
Ainsi, dans un souci de large diffusion de l’information auprès du public, garantie du
respect du pluralisme, les éditeurs de presse souhaitent maintenir et développer les
partenariats avec les intermédiaires, et en particulier les moteurs de recherche, qui
contribuent à améliorer l’audience de la presse et à développer les ressources du
secteur.
2/10
Favoriser le développement de nouveaux business models générateurs de revenus,
indispensables pour préserver et accroître les investissements dans l’innovation et la
qualité de la production éditoriale.
Le présent document a pour objectif de mettre en exergue, dans le cadre juridique actuel, les
problèmes que rencontrent les éditeurs de presse dans l’environnement numérique, et de soumettre
des
propositions de modification de la directive dite « droit d’auteur » de 20011 qui visent à créer,
au bénéfice des éditeurs :
Exceptions
droit
;
d'auteur
(out of
d’autre part, un droit de communication au public, pour assurer une protection contre
scope)
toute commercialisation indue de leurs contenus, et anticiper les futurs usages et modes
de distribution de la presse, tout en préservant l’accès à un internet libre et ouvert aux
internautes. Il s’agit en particulier de prévoir une protection par le droit voisin au profit des
éditeurs uniquement lorsque leurs contenus sont manifestement utilisés par des tiers à des
fins directement commerciales et dans des conditions indues.
Préambule
Le modèle économique de la presse se consolide peu à peu, grâce notamment à des offres
de contenus numériques adaptées aux nouveaux usages et modes de consommation, et de
plus en plus ciblées aux différents lectorats.
Les audiences2, massives, de la presse se développent grâce au digital :
96 % des Français
lisent chaque mois la presse dans sa version
print ou digitale (ordinateur, mobile, tablette),
soit 49 millions de lecteurs.
Grâce au « Print » : 33 millions de Français lisent chaque jour au moins un titre de presse
(quotidien ou magazine)
Et maintenant grâce au digital :
35 millions de Français, soit 2/3, consultent chaque mois
les sites de presse
·
dont 21 millions de « mobinautes »,
·
et 12 millions d’utilisateurs de tablettes
Ces audiences ont été créées ex-nihilo, en moins de 15 ans, notamment auprès des
jeunes générations.
56 % des 15-24 ans lisent au moins une marque de presse sur mobile.
Les éditeurs de presse, ne cessent d’investir dans la qualité de la production éditoriale, en
s’adaptant aux enjeux du numérique et aux attentes de leurs lecteurs pour :
1 Directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la
société de l’information
2 Source Audipresse : ONE 2014-2015 et One Global V4 2015
3/10
conjuguer qualité de l’information (décryptage de l’information, fiabilité, pertinence,
analyses, intérêt pour le lecteur...) ;
et instantanéité (nécessité permanente de produire l’information avant les autres, en
temps réel).
La presse s’inscrit dans une logique de partenariat avec l’ensemble des intermédiaires
techniques ou des diffuseurs qui permette, dans le respect des droits des journalistes et
des éditeurs :
-
de garantir le respect du principe constitutionnel de liberté de communication et ses
trois branches :
·
la liberté de diffusion de la presse auprès du public quelle que soit sa forme
i.e.
sur papier ou en ligne;
·
la liberté d'expression de tout organe de presse en empêchant tout contrôle des
contenus en dehors de celui qu’exerce le juge ;
·
la liberté de réception des informations qui a pour corollaire l'impossibilité de
priver le public de l’accès aux informations par tout procédé et ainsi de lui
assurer la continuité de la réception des informations via des procédés
techniques nouveaux.
-
de consolider les ressources économiques du secteur.
LA PRESSE NE BENEFICIE AUJOURD’HUI QUE D’UNE FAIBLE PROTECTION AU REGARD DE LA PROPRIETE INTELLECTUELLE
La directive « droit d’auteur » de 2001 prévoit en effet que seul l’auteur (le journaliste) est
protégé. Elle ne reconnait aucune existence à l’éditeur ou dans la chaîne de création ni statut
en tant que producteur de contenus
Le droit français (loi dite « Hadopi » du 12 juin 2009) complète et prévoit que l’éditeur est
cessionnaire automatique des droits des journalistes, mais dans des conditions limitées (voir
annexe) :
·
pour les seuls articles de la période d’actualité ;
·
sous réserve d’un accord d’entreprise.
Les éditeurs ne disposent donc d’aucune « protection intellectuelle » générale sur leur
publication (« l’œuvre collective » = le journal dans sa globalité, le PDF, le site internet,
l’application…).
Les éditeurs sont cessionnaires des droits pour des parties de ce tout (les articles), et encore
pour des usages limités (période d’actualité).
Les autres industries culturelles (cinéma, musique, audiovisuel) sont mieux protégées grâce
au « droit voisin ».
Ce droit permet de protéger leurs investissements, dont ceux réalisés en vue de la diffusion
et de l’exploitation d’une œuvre de l’esprit.
Cette situation s’explique notamment par le fait que lors de l’élaboration de la directive
« droit d’auteur » de 2001, il n’y a pas eu de débat sur l’opportunité de créer un droit voisin
pour les éditeurs de presse, dans un contexte où :
4/10
les journalistes bénéficient de la protection du droit d’auteur, et les éditeurs peuvent
être, quant à eux, cessionnaires des droits d’auteur, dans des conditions
conventionnelles et légales strictes. L’ensemble de ces droits a pu vraisemblablement
paraître suffisant à cette époque pour assurer la protection, et donc l’exploitation des
contenus presse ;
compte tenu du faible développement de la distribution en ligne de la presse dans les
années 2000, les éditeurs n’étaient pas confrontés à la problématique de maîtrise de la
diffusion de leur contenu dans les mêmes termes que les producteurs de musique et de
vidéogrammes (développement des supports d’enregistrements comme la cassette ou
le CD) ou que les chaînes de télévision (distribution par câble ou par satellite).
Or les usages et les modes de consommations de l’information ont considérablement évolué depuis
2001, comme en témoignent les audiences massives de la presse sur les supports numériques.
LES CONSEQUENCES DE CETTE INSUFFISANCE DE PROTECTION INTELLECTUELLE
1.
:
Exceptions
droit
d'auteur
(out of
scope)
3 Cour Fédérale de Justice du 21 avril 2016, VG Wort.
6/10
·
cette liberté de lier cesse néanmoins dès lors que l’accès à la ressource
protégée est soumis à des restrictions sur le site où elle se trouve (ex. accès
réservé aux abonnés).
-
Il est à noter que la Cour a cependant été silencieuse sur la finalité commerciale de la
fourniture des liens. L’objectif de profit n’a pas été discuté au stade de la définition des
actes soumis au droit exclusif. Elle a par ailleurs refusé d’entrer dans la distinction entre
les liens simples et les
frames (pratique consistant à afficher, lors de l’activation du lien,
la ressource reliée dans une fenêtre aux couleurs ou au nom du site où se trouve le lien).
Elle légitime donc cette pratique en considérant que cela ne modifie en rien ses
conclusions.
Dans ce contexte
, il apparait indispensable d’adapter le cadre juridique actuel afin que les éditeurs
et les agences de presse puissent être protégés face à ces acteurs qui exploitent indûment leurs
contenus, quelle que soit la forme de cette exploitation, et ainsi être en capacité de négocier
l’exploitation de leurs publications lorsque des tiers les utilisent à des fins directement commerciales.
Cette protection devra cependant être limitée afin de ne pas remettre en cause les possibilités
d’accès à l’information permises par des opérateurs qui facilitent le référencement et l’accès aux
contenus de presse comme les moteurs de recherche. Ces acteurs, avec qui les éditeurs ont noué
des partenariats solides, sont en effet aujourd’hui des acteurs indispensables à la consolidation de
l’économie de la presse en ce qu’ils assurent au public l’accès aux contenus de presse et renvoient,
sans commercialisation, les lecteurs vers les sites des éditeurs de presse. Ils sont au surplus un
rouage essentiel de la diffusion de l’information et du pluralisme.
LES AUTRES INDUSTRIES CULTURELLES (CINEMA, AUDIOVISUEL, MUSIQUE) SONT MIEUX PROTEGEES GRACE AU « DROIT
VOISIN »
Les autres industries culturelles (cinéma, audiovisuel, musique) ont été confrontées plus tôt que la
presse à une intermédiation de leur diffusion (hertzien, câble, satellite….) et ont obtenu une
protection renforcée grâce au « droit voisin » dans les directives de 1992 et 2001, et en droit français
dès 1985.
Ce « droit voisin » permet aujourd’hui de protéger leurs investissements réalisés notamment en vue
de la diffusion et de l’exploitation d’une œuvre de l’esprit.
Les intérêts concrets de ce droit sont par exemple :
-
Les services audiovisuels peuvent interdire ou autoriser la reprise de leurs contenus sur
des plates-formes telles que YouTube ;
-
Par décision de justice (février 2016), France Télévisions a interdit à la plate-forme
playtv.fr éditée par Playmédia la rediffusion de ses émissions ;
-
L’arrêt Reprobel ne remet pas en cause le bénéfice de la rémunération pour copie privée
de la musique, de l’audiovisuel et du cinéma (100 M€ en France) parce que ces
industries sont des ayants droit directs au titre du droit voisin.