Document 25
Ref. Ares(2020)3092549 - 15/06/2020
COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, 1.2.2019
C(2019) 872 final
OUT OF SCOPE
Belgique
DÉCISION DE LA COMMISSION EUROPÉENNE EN APPLICATION DE L’ARTICLE 4 DES
MODALITÉS D’EXÉCUTION DU RÈGLEMENT (CE) Nº 1049/20011
Objet:
Demande confirmative d’accès à des documents en vertu du
règlement (EC) Nº 1049/2001 - GESTDEM 2018/5879
Madame,
Je fais suite à votre courriel du 11 décembre 2018, enregistré le 19 décembre 2018, par
lequel vous présentez une demande confirmative conformément à l’article 7, paragraphe
2, du règlement (CE) nº 1049/2001 relatif à l’accès du public aux documents du
Parlement européen, du Conseil et de la Commission (ci-après «le règlement (CE)
nº 1049/2001»).
1.
OBJET DE VOTRE DEMANDE
Dans votre demande initiale du 9 novembre 2018, adressée à la direction générale de
l’environnement, vous sollicitiez l’accès à la lettre de mise en demeure complémentaire
envoyée par la Commission européenne le 8 novembre 2018 dans le cadre de la
procédure en manquement 2016/2005 contre la Belgique pour non-respect des valeurs
limites pour le dioxyde d’azote (NO2).
Dans sa réponse initiale du 15 novembre 2018, la direction générale de l’environnement
a refusé l’accès au document en question sur la base de l’exception prévue à l’article 4,
paragraphe 2, troisième tiret, du règlement (CE) nº 1049/2001 (protection des objectifs
des activités d’inspection, d’enquête et d’audit).
1
Journal officiel L 345 du 29.12.2001, p. 94.
Commission européenne/Europese Commissie, 1049 Bruxelles/Brussel, BELGIQUE/BELGIË - Tel. +32 22991111
Par votre demande confirmative, vous sollicitez une révision de cette position. En
particulier, vous affirmez qu’il existe un intérêt public supérieur justifiant la divulgation
du document en question.
2.
ÉVALUATION ET CONCLUSIONS AU TITRE DU REGLEMENT (CE) Nº 1049/2001
Lors de l’évaluation d’une demande confirmative d’accès à des documents introduite
conformément au règlement (CE) nº 1049/2001, le secrétariat général procède à un
nouvel examen de la réponse donnée par la direction générale ou le service compétent au
stade initial.
À la suite de cet examen, j’ai le regret de vous informer que le refus d’accorder l’accès
au document demandé doit être confirmé sur la base de l’exception prévue à l’article 4,
paragraphe 2, troisième tiret, du règlement (CE) nº 1049/2001 (protection des objectifs
des activités d’inspection, d’enquête et d’audit), pour les raisons exposées ci-après.
L’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement (CE) nº 1049/2001 prévoit que
«[l]es institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait
atteinte à la protection: [...] des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit».
Cette disposition a été interprétée par la Cour de justice notamment dans l'arrêt
LPN, où
elle a souligné «qu’il peut être présumé que la divulgation des documents afférents à une
procédure en manquement, au cours de la phase précontentieuse de celle-ci, risque
d’altérer le caractère de cette procédure ainsi que d’en modifier le déroulement, et que,
partant, cette divulgation porterait, en principe, atteinte à la protection des objectifs des
activités d’enquête, au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement […]
1049/2001»
.2
Cette jurisprudence confirme l'interprétation du Tribunal dans l'arrêt
Petrie, en vertu de
laquelle «[…] les États membres sont en droit d'attendre de la Commission la
confidentialité pendant les enquêtes qui pourraient éventuellement déboucher sur une
procédure en manquement. Cette exigence de confidentialité perdure même après la
saisine de la Cour au motif qu'il ne peut pas être exclu que les négociations entre la
Commission et l'État membre concerné, visant à ce que celui-ci se conforme
volontairement aux exigences du traité, puissent continuer au cours de la procédure
judiciaire et jusqu'au prononcé de l'arrêt de la Cour».3
En vertu d'une jurisprudence bien établie, ladite présomption générale de non-divulgation
trouve à s'appliquer indépendamment du nombre de documents en cause, y compris à
l'égard d'un seul document.4 Cela signifie également que l’institution n’est pas obligée de
2
Arrêt du 14 novembre 2013 dans les affaires jointes C-514/11 P et C-605/11 P,
Liga para a Protecção
da Natureza (LPN) et République de Finlande c. Commission européenne
, EU:C:2013:738, point 65 et
Arrêt du 16 juillet 2015 dans l’affaire C-612/13 P, ClientEarth c. Commission, EU:C:2015:486, points
75-76.
3
Arrêt du 11 décembre 2011 dans l’affaire T-191/99, Petrie et al. C. Commission, EU:T:2001:284,
point 68.
4
Arrêt du 4 juillet 2016 dans l’affaire C-271/15 P, Sea Handling, EU:C:2016:557, point 41.
2
faire une analyse individuelle et concrète du contenu de chaque document faisant partie
du dossier.
Le facteur d’unification du raisonnement de cette jurisprudence relative à la
reconnaissance d'une présomption générale de refus d’accès aux documents afférents aux
procédures d’enquête consiste en ce que ledit accès s’avère incompatible avec leur bon
déroulement et risque de compromettre de manière irréversible leur résultat.5 L'objectif
de l'enquête dans le cadre d'une procédure en manquement consiste à amener l'Etat
Membre concerné à se conformer au droit européen.
En l’espèce, la lettre de mise en demeure auquel vous demandez l’accès fait partie du
dossier de la procédure en manquement 2016/2005 contre la Belgique qui est toujours
pendante. Conformément à la jurisprudence susmentionnée, j'estime que le document
concerné par votre demande d'accès est couvert dans son entièreté par une présomption
générale de non-divulgation dès lors que sa divulgation compromettrait de manière
irréversible le climat de confiance mutuelle et la confidentialité indispensable au bon
déroulement de la procédure en manquement en question.
J'en conclus que sa divulgation porterait atteinte à la protection des objectifs des activités
d’enquête, au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement (CE)
nº 1049/2001.
3.
ACCÈS PARTIEL
Il convient de souligner qu'en vertu d'une jurisprudence constante, les documents
couverts par une présomption générale de non-divulgation échappent à l'obligation d'une
divulgation, intégrale ou partielle, de leur contenu. 6
J’ai néanmoins examiné la possibilité d’octroyer un accès partiel au document demandé,
conformément à l’article 4, paragraphe 6 du règlement (CE) nº 1049/2001. Aucun accès
partiel n’est cependant possible en l'espèce, étant donné que le document demandé est
entièrement couvert par l'exception visée à l'article 4, paragraphe 2, troisième tiret du
règlement (CE) nº 1049/2001, comme expliqué ci-dessus.
4.
ABSENCE D’INTERET PUBLIC SUPERIEUR JUSTIFIANT LA DIVULGATION DU
DOCUMENT
L'exception de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret du règlement (CE) nº 1049/2001
s'avère inapplicable s'il existe un intérêt public supérieur justifiant la divulgation. Un tel
intérêt doit, en premier lieu, être public et, ensuite, doit l’emporter sur l’intérêt protégé en
vertu de cette disposition.
À titre préliminaire, je vous prie de noter que l’analyse effectuée dans le cadre de la
présente décision confirmative ne concerne que l’application du règlement (CE)
nº 1049/2001.
5
Arrêt du 25 septembre 2014 dans l’affaire T-306/12, Spirlea c. Commission, EU:T:2014:816, point 57.
6
Arrêt du 28 novembre 2013 dans l’affaire C-404/10 P, Commission c. Editions Odile Jacob,
EU:C:2012:393, point 133.
3
Dans votre demande confirmative vous contestez «la mise en place d’une interdiction
permanente et définitive de la circulation de certains véhicules – en fonction du carburant
utilisé et de leurs normes Euro - dans le cadre de l’établissement d’une zone de basses
émissions».
Vous indiquez que cette interdiction soulève diverses questions d’intérêt public, telles
que la question de la compatibilité de cette mesure avec la directive 2007/46/CE
établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des
systèmes, des composants et des entités techniques destinées à ces véhicules du 5
septembre 2007, la directive 2014/45/UE relative au contrôle technique périodique des
véhicules à moteur et de leurs remorques du 3 avril 2014, ainsi qu’avec les engagements
de l’EU pris lors de la Conférence annuelle des Parties (la «COP21»), organisée à Paris
entre le 7 et le 8 décembre 2015. Vous invoquez aussi que cette mesure soulève la
question de la libre circulation des personnes et des biens dans l’Union européenne, dès
lors qu’elle instaure un contrôle par caméras utilisant un système de reconnaissance
automatique de plaques dans la région de Bruxelles-Capitale et dès lors qu’elle requiert
que tout véhicule étranger ainsi que son conducteur, s’enregistre au préalable en vue
d’accéder à cette région. De plus, vous invoquez que la mesure pose un problème de
proportionnalité dès lors qu’elle est établie sur l’ensemble d’une région de l’Union et une
question de justice sociale, dans la mesure où les classes sociales à faible revenu seraient
plus touchées par l’établissement des zones de basses émissions.
Tout d’abord, il convient de rappeler que la divulgation du document faisant partie du
dossier de la procédure en manquement 2016/2005 contre la Belgique, porterait un risque
réel et non hypothétique que le dialogue avec les autorités belges mène à un résultat qui
ne soit pas optimal, ce qui, à mon sens, irait à l'encontre de l'intérêt public.
A contrario, j’estime que les arguments auxquels vous vous référez pour soutenir qu’il
existerait un intérêt public supérieur dans la divulgation du document en question sont
purement hypothétiques.
Récemment, dans l’arrêt
Pint, le tribunal a réaffirmé que «[…] la personne qui entend
s’opposer à un motif de refus de divulgation doit, d’une part, faire valoir l’existence d’un
intérêt public susceptible de primer ce motif et, d’autre part, démontrer précisément que,
dans le cas d’espèce, la divulgation des documents concernés contribuerait, de manière
concrète, à assurer la protection de cet intérêt public à un point tel que le principe de
transparence prime la protection des intérêts ayant motivé le refus de divulgation, à
savoir, en l’espèce, la protection des objectifs de l’activité d’enquête […]. Des
considérations d’ordre général ne sont pas suffisantes à cet égard».7
En l’espèce, dans votre demande confirmative vous n’indiquez pas comment la
divulgation de la lettre complémentaire de mise en demeure contribuerait à la protection
de l’intérêt public supérieur d’une manière concrète.
Vous indiquez simplement que «[…] la mise en demeure complémentaire de la
Commission risque d’avoir des conséquences financières pour un grand nombre de
7
Arrêt du 9 octobre 2018 dans l’affaire T-634/17, Pint c. Commission, EU:T:2018:662, point 48.
4
citoyens belges et contribue à empêcher la libre circulation sur l’ensemble du territoire
d’un(e) Région de l’Union européenne […]».
Je constate qu’il s’agit de considérations d’ordre général qui ne sauraient suffire aux fins
d’établir qu’un intérêt public supérieur prime sur les raisons justifiant le refus de
divulgation de document en question.8
Il ressort de ce qui précède que vous n'avez pas établi l'existence d'un intérêt public
supérieur au sens de l'article 4, paragraphe 2, troisième tiret du règlement (CE)
nº 1049/2001.
De plus, je considère que l'intérêt public qui doit prévaloir en l'espèce est celui de la
protection des objectifs de l'enquête qui est actuellement en cours dans le cadre de la
procédure en manquement en question.
Par conséquent, je dois conclure que, dans ce cas particulier, il n’y a pas d’intérêt public
supérieur qui justifierait une restriction de la protection des objectifs d'enquête garantie
par l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret du règlement (CE) nº 1049/2001.
Le fait que le document en question ait été rédigé dans le cadre d'une procédure
administrative renforce cette conclusion. La Cour de justice a en effet reconnu l'existence
d'une présomption d'accessibilité plus large dans les cas où les institutions
communautaires agissent en qualité de législateur que dans les cas où les documents en
question s’inscrivent dans le cadre de leurs fonctions administratives.9
5.
VOIES DE RECOURS
Enfin, j’attire votre attention sur les voies de recours dont vous disposez contre cette
décision. Vous pouvez, sous les conditions de l’article 263 du Traité sur le
fonctionnement de l'union européenne, former un recours devant le Tribunal ou, sous les
conditions de l’article 228 du Traité sur le fonctionnement de l'union européenne,
déposer une plainte auprès du Médiateur européen.
Je vous prie de croire, Madame, à l’assurance de ma considération distinguée.
Par la Commission
Martin SELMAYR
Secrétaire général
8
Arrêt du 14 novembre 2013 dans les affaires jointes C-514/11 P et C-605/11 P,
Liga para a Protecção
da Natureza (LPN) et République de Finlande c. Commission européenne
, EU:C:2013:738, point 93.
9
Arrêt du 29 juin 2010 dans l’affaire C-139/07 P, Commission / Technische Glaswerke Ilmenau,
EU:C:2010:376, point 60.
5