Ref. Ares(2021)1762631 - 11/03/2021
Le 9 mars 2021
Madame Ursula Von der Leyen,
Présidente de la Commission européenne
Madame la Présidente,
On ne peut qu’approuver l’importance que la Commission attache au dérèglement climatique
et à la maîtrise des émissions de gaz à effet de serre.
La France fait partie des États Membres les moins émetteurs, grâce à sa production
d’électricité décarbonée, résultat de la politique nucléaire initiée dans les années 1970, de la qualité
de son expertise et de son tissu industriel. Maintenir ce potentiel, et même le développer, est
aujourd’hui primordial pour une lutte efficace contre le réchauffement climatique et pour maintenir
la capacité industrielle de l’Europe dans ce domaine, face aux États-Unis et à la Chine. Ne pas faire tous
les efforts pour le maintenir serait une faute politique grave.
L’Association de Défense du Patrimoine Nucléaire et du Climat (PNC-France), rassemble des
personnalités politiques de toutes sensibilités et des scientifiques de haut niveau (dont 2 prix Nobel)
qui partagent cette analyse. Cette Association, que je préside, entend sensibiliser les élus européens,
nationaux et locaux, afin de sauvegarder le patrimoine scientifique, industriel, économique et social
que constitue la filière électronucléaire, au moment où le défi climatique apparait dans toute son
ampleur et où d’aucuns, mus par des préjugés ou une idéologie, s’efforcent d’obtenir sa réduction,
voire son anéantissement.
La politique énergétique française est naturellement dépendante de ce qui s’élabore dans le
cadre européen, même si selon le Traité de Lisbonne les États Membres peuvent librement définir leur
mix énergétique. Les grandes orientations de politique - notamment en matière climatique - sont
prises à l’échelon européen et il nous semble que la place accordée à l’énergie nucléaire dans les
propositions, discussions et décisions prises par la Commission est par trop limitée. En effet, si le
nucléaire est bien mentionné dans certains documents de portée générale, on constate qu’il est
pratiquement oublié ou même exclu dans les textes de portée concrète. Ceci est particulièrement
préoccupant quand on en vient aux Instruments Financiers.
L’Union Européenne, en partie grâce à la France, s’est dotée d’un budget régulier augmenté
d’un paquet post-Covid de 750 milliards d’euros, dont près de 40% doivent être consacrés à des projets
compatibles avec l’objectif climatique de réduction de 55% d’émission de GES d’ici à 2030. Le défi est
énorme. Dès lors, il est surprenant de constater que bien des outils de financement européens
excluent le nucléaire et soutiennent les projets gaziers, alors que le gaz émet 70 fois plus de CO2 par
KWh, et qu’il est essentiellement importé d’un Pays Tiers.
Dans cette même logique, les discussions relatives à la Taxonomie de Financement Durable
(Taxonomy Sustainable Financing) nous paraissent devoir être urgemment réorientées pour prendre
en compte toute la dimension de la « durabilité sociétale », au-delà de la « durabilité
environnementale ». En effet, tout en s’apprêtant à reconnaître - contre toute logique - le gaz comme
une « énergie verte », la Commission semble s’apprêter à exclure le nucléaire. La réflexion doit à notre
Association de Défense du Patrimoine Nucléaire et du Climat (PNC-France)
73 rue du Château – Boulogne-Billancourt 92100
N° SIREN 893384362 – mail :
@pnc-france.org
sens inclure non seulement la dimension environnementale mais également les dimensions
économiques et de fiabilité de l’approvisionnement. Il est essentiel en effet que les européens
disposent à tout moment d’une énergie décarbonée, économique et fiable, assurant l’indépendance
géostratégique de l’Europe. Les déstabilisations de réseaux survenues récemment dans plusieurs États
Membres et le black-out européen évité de justesse le 8 janvier 2021, les graves coupures d’électricité
en Californie, au Texas et en Australie montrent l’importance de disposer d’une puissance décarbonée
suffisante et mobilisable à tout moment, deux caractéristiques que seuls le nucléaire et l’hydraulique
réunissent.
Tous les grands acteurs mondiaux (États-Unis avec le Royaume-Uni et le Canada, Russie, Chine,
Inde, et nombres de pays émergents) ont inclus le développement du nucléaire civil dans leur stratégie
climatique et énergétique. L’Union Européenne, en grande partie grâce à la France, a été à la pointe
de la technologie dans ce domaine. Conformément à vos déclarations dans votre discours d’ouverture,
appelant une vision plus géostratégique de l’Union européenne, il nous semble essentiel de préserver
cette position éminente dans le panorama industriel et scientifique. Le dossier nucléaire mérite donc
toute l’attention des Institutions Européennes.
Le traité Euratom est un Traité promotionnel pour l’énergie nucléaire - puisqu’il était lors de
sa signature et que rien n’y a été modifié depuis, lors d’adhésions successives d’États Membres -
l’Union dispose ainsi du cadre législatif nécessaire pour que cette forme d’énergie très bas carbone
soit mieux prise en compte dans la politique énergétique de l’Union et de ses outils de mise en œuvre.
J’ai pleinement conscience du caractère clivant du dossier nucléaire, sujet sans fin de
polémiques sans bases scientifiques et entretenues pour des raisons politiciennes. Je veux croire
néanmoins que l’ensemble de la Commission européenne saura dépasser les pressions idéologiques
constantes et mieux considérer les atouts de l’énergie nucléaire dans les décisions concrètes prises par
l’Union Européenne en s’appuyant sur des faits, pour une transition climatique et énergétique
sociétalement durable.
Pour toutes ces raisons, j’ai l’honneur de solliciter une audience auprès de vous.
Je vous prie d’agréer, Madame la Présidente, l’expression de ma respectueuse et haute
considération.
PNC-France
Association de Défense du Patrimoine Nucléaire et du Climat (PNC-France)
73 rue du Château – Boulogne-Billancourt 92100
N° SIREN 893384362 – mail :
@pnc-france.org